L’ELOGE DE LA SOLITUDE
« Il est facile de se tenir
avec la foule. Il faut du courage pour être seul ».
Mahatma Gandhi
L’existence humaine prend sa source et sa
fin dans la solitude. Elle commence dans la solitude du ventre maternel avec
l’ingéniosité divine et se termine dans la solitude, le silence, l’obscurité et
la gravité de la tombe. Alors une existence humaine sans solitude n’en est pas
une. Une grande œuvre ne peut pas s’accomplir sans la solitude de l’inspiration
et de la création. La solitude est l’antichambre de la grandeur. Elle est le
salon où prend place confortablement la vérité. Celle-ci n’est pas souvent du
côté de la masse ou du groupe.
La foule ne réfléchit pas. Elle détient
l’adhésion populaire et non la vérité. Elle manipule l’opinion et pas la
réalité. « Or, on sait combien
l’opinion est aveugle, tyrannique, accessible aux préjugés de toute sorte… »[1]. Elle peut emprunter
longtemps la voie de la justice mais finit toujours par dévier de son chemin.
Elle maquille l’environnement mais est incapable de polluer l’air de la beauté,
de la bonté et de la vérité.
L’histoire de l’Humanité illustre que les
hommes épris de justice, d’égalité et de liberté sont toujours sacrifié à
l’autel de l’obscurantisme, de la manipulation, du mensonge et des fausses
accusations. Ils ont toujours fini
par être écartés de la marche de l’histoire, méthodiquement et théoriquement. Mais
heureusement, on ne peut pas parler de l’histoire sans eux. Parler de leurs
bourreaux, c’est d’une certaine manière parler d’eux aussi. On ne peut pas
parler de la philosophie sans la figure emblématique de Socrate, de la lutte
contre la ségrégation raciale sans Martin Luther King, du Sénégal indépendant
sans Mamadou Dia, du Burkina Fasso sans Thomas Sankara, de l’Apartheid sans
Nelson Mandela. Ce sont là des figures historiques qui ont payé de leur
existence la résistance contre l’oppression, de quelle que nature qu’elle soit,
pour libérer leur peuple de la domination. La solitude ne rime pas toujours
avec la justice mais elle est une compagne de la grandeur et de la vérité
historique.
La solitude est le cheminement des grands
hommes et des esprits versés dans la quête du savoir et de la spiritualité.
Pour savoir, il faut être seul. Pour produire aussi, ou du moins
intellectuellement parlant. La conception intellectuelle est comparable à la
gestation maternelle qui va de la grossesse à l’accouchement. Tout ce processus
ne peut se faire que dans une solitude rythmée, dans une sorte d’absence des
autres. Même le soleil qui éclipse tous les autres astres a besoin de se
plonger dans la solitude de la nuit pour réapparaître à travers une très belle
vue le lendemain. On parlerait alors d’un beau levée de soleil.
Le mode de déploiement des actions
réussies de la vie, c’est la solitude. La solitude ici n’est pas seulement
absence des autres ni leur éloignement. Elle peut signifier aussi la solitude
de la conscience qui finit par la mettre en face d’elle-même. Ainsi elle peut
se regarder en face et contempler sa beauté. Elle ne va pas verser dans le
narcissisme mais se connaîtra davantage elle-même pour encore tendre vers son
Seigneur et vers les autres consciences.
Il
y a des solitudes qui s’accompagnent d’idées novatrices. Il y a des présences
qui signifient absence et des absences plus remarquables que la présence. C’est
selon. La véritable solitude, c’est celle que l’on a vis-à-vis de soi-même. Car
en réalité, on n’est jamais seul. On est toujours avec sa conscience et on a
toujours la conscience de Dieu, c’est-à-dire la présence et la compagnie de
notre Créateur. La solitude est la marque de la présence de Dieu à nos côtés. Son
vécu est une excellente occasion spirituelle de recentrage.
Par contre, il y a beaucoup de personnes
qui vivent entourées de leurs semblables et qui sont dispersées, séparées de
leurs âmes fugitives. Elles font semblant d’être épanouies alors qu’elles
vivent dans la plus grande solitude, celle-ci est éternelle et n’a aucun lien
avec les autres. La compagnie n’est pas seulement humaine. Elle est aussi
divine. Elle est une idée que l’on se fait de soi-même, un entourage
conceptuel, idéologique et spirituel que l’on peut construire soi-même, par
soi-même et pour soi-même.
Les
trésors humains sont cachés dans le silence des nuits profondes et dans la
solitude des temps ancestraux. Ils ont traversé les âges et les contrées pour
nous parvenir. La solitude n’est point une malédiction mais un passage obligé
pour entrer dans la cour des grands. La solitude n’est pas seulement naturelle
pour l’homme. Elle est la nature de l’homme même, dans sa joie et sa
souffrance, dans ses succès et ses échecs, dans ses grandeurs et ses misères.
On ne peut pas partager avec exactitude les sentiments et les émotions des
autres tels qu’ils le ressentent. Chacun est seul dans ses émotions et ses
états d’âme. La souffrance de la maladie est
individuellement vécue. Elle ne peut pas être partagée. A chacun sa souffrance.
Il n’y a pas de vécu collectif quant à la souffrance. Certes il y a la
commisération, mais la souffrance demeure une expérience personnelle et
individuelle que chacun vit à sa propre manière. La maladie rime avec la
solitude dans ce que l’on ressent soi-même. Elle rime avec le doute, la remise
en cause de soi- même et de ses évidences.
La
nuit est faite pour accueillir le sommeil et le silence. Elle est faite pour se
reposer. Mais aussi elle est favorable, très favorable à la réflexion, à la
méditation et à la prière. La terre reste calme et le ciel dort tranquillement.
Tout est favorable à ce repli sur soi-même que constitue la méditation voire la
prière. Dieu est attentif à ce que nous faisons à tout moment. Mais Il devient
plus attentif à nos sollicitations pendant la nuit. Il vient jusqu’à notre
niveau pour nous écouter avec Providence.
La
nuit est porteuse de rêves et d’espoirs. Elle apporte des solutions à nos
problèmes. Elle est propice à la recherche de solutions à nos problèmes. La
nuit est aussi porteuse d’inspiration. La nuit est porteuse de conseils, la
nuit est porteuse de silence bavard. La nuit est porteuse de solitude
pédagogique. La nuit est magique. Elle est traversée par un silence créateur,
inventeur et annonciateur de ce que le futur sera fait. Traverser la nuit,
c’est traverser la connaissance voire la sagesse. La nuit symbolise le soleil
de l’esprit, le moment propice à la réflexion, à la méditation et à la prière.
L’obscurité nocturne n’est pas obscurantisme. La nuit n’est pas absence de
lumière mais symbole de la clarté de l’esprit. C’est un monde d’expression de
l’invisible et du sacré.
Le
travail physique se fait en plein jour. Le travail de l’esprit se pratique
mieux durant la nuit, quand tout devient calme. Quand les feuilles des arbres
murmurent et les sifflets de certains insectes occupent la nature, l’esprit se
replie sur lui-même et produit de la lumière. La lumière de l’esprit traverse
la nuit jusqu’à l’aube. La nuit est solution. Elle donne un sens au jour. Les
esprits supérieurs dorment peu et souvent traversent des nuits entières à
réfléchir sur la destinée des hommes et des peuples.
La nuit fait sentir le poids de la présence de Dieu sur le monde et
les âmes. Les âmes sont emportées dans les prairies de l’Éternité pour contempler
la Divinité. La nuit permet à certaines créatures divines d’exister et de
s’épanouir. Il faut être attentif et courageux pour entendre le cri perçant de
la nuit, son appel puissant à la méditation et à la prière. Il faut être d’un
esprit attentif pour traverser la nuit de la solitude et le calme de la
sagesse.
Ngor DIENG
Psychologue conseiller/Philosophe
ngordieng@gmail.com
Ah oui, je suis parfaitement en phase avec toi. Il n'y a pas mieux que la solitude pour progresser et faire progresser le monde par des prières ou des initiatives, mais il n'y a pas plus effrayant non plus quand on ne s'en sert pas.
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